Parce que l’urgence climatique frappe à nos portes et que l’Etat français ne tient pas ses engagements, la Fondation Nicolas Hulot et 3 organisations défendant l’intérêt général – Greenpeace France, Oxfam France et Notre Affaire à Tous – ont lancé en décembre 2018 « L’Affaire du Siècle » : un recours juridique inédit contre l’État français pour inaction face au dérèglement climatique.
En 48h, 1 million de personnes ont fait part de leur soutien à cette initiative en signant la pétition « l’Affaire du Siècle ». En un mois, ce sont plus de 2 millions de citoyennes et citoyens qui avaient rejoint l’action. Une mobilisation hors du commun pour une affaire qui vise un objectif historique : faire reconnaître par la justice la responsabilité de l’État français dans le réchauffement climatique et l’obliger à agir !
L’AFFAIRE DU SIÈCLE ft. McFly & Carlito, Marion Cotillard, CYR!L, Juliette Binoche et 27 autres !
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Attaquer l’État en justice parce qu’il ne tient pas ses objectifs climat
Alors que nous connaissons depuis les années 1960 les causes du dérèglement climatique, les gouvernements français successifs ont toujours reporté à plus tard les décisions courageuses permettant d’éviter la catastrophe. La France, pays de la COP21, ne se donne pas les moyens de respecter ses propres engagements sur le climat et l’énergie. L’État français s’est pourtant engagé à tout faire pour contenir les changements climatiques en dessous de 2°C et si possible 1,5°C, avec la ratification de l’accord de Paris, les différents accords européens et les textes nationaux sur le climat. La France a pris un retard conséquent et n’atteint pas ses objectifs sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Parallèlement, les inégalités face au changement climatique s’aggravent. Il est grand temps de mettre l’État face à ses responsabilités !
La procédure juridique de l’Affaire du Siècle vise trois objectifs
- Faire reconnaître par le juge la carence de l’État en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, et le préjudice causé à l’environnement par ce retard. Les organisations entendaient également faire reconnaître par la justice l’obligation générale de l’Etat d’agir face au changement climatique pour nous protéger des catastrophes à venir.
- Forcer l’État à agir pour respecter ses engagements climatiques et à réparer le préjudice causé à l’environnement, par une décision du juge. Le juge peut donner une injonction à agir à l’État.
- Sans attendre la décision du juge, amener l’État à agir par la pression que nous exerçons toutes et tous, ensemble, en étant des millions à nous mobiliser pour plus de justice climatique et sociale.
Début 2020, la justice s’est prononcée sur le premier objectif, condamnant l’Etat pour carence fautive. Mi-2021, les juges annonceront si oui on non ils condamnent aussi l’Etat à agir pour rattraper son retard climatique.
Quelles sont les étapes de l’Affaire du Siècle ?
1 - Une demande préalable d’agir… et une une réponse négative
Le 17 décembre 2018, les 4 organisations co-requérantes ont envoyé une “demande préalable indemnitaire” au Premier ministre ainsi qu’à 12 membres du gouvernement. Dans ce courrier, elles leur demandent de prendre toutes les mesures urgentes qui permettraient de rattraper le retard de la France en matière climatique, par rapport aux objectifs fixés. Le 15 février 2019, le gouvernement rejette la demande : il estime en faire déjà beaucoup sur la question climatique. Son argument ? Nous, citoyens, entreprises ne serions pas prêts à changer et les retards seraient surtout imputables aux gouvernements précédents… Suite à ce refus, une seule option pour les ONG : attaquer l’État en justice.
2 - Lancement de la procédure judiciaire et ouverture de la période d’instruction
Le 14 mars 2019, la procédure judiciaire est formellement ouverte devant le tribunal administratif de Paris. Le 20 mai, nous déposons un mémoire complémentaire avec de nouveaux arguments qui démontrent l’inaction de l’État. L’État dépose finalement son mémoire en réponse le 23 juin, soit un an après le début de la procédure. Une fois encore, il nie toute responsabilité dans le changement climatique et dans le manquement de ses objectifs… A ce même moment, trois organisations viennent soutenir le recours de l’Affaire du Siècle : la Fondation Abbé Pierre, France Nature Environnement et la Fédération Nationale d’Agriculture Biologique. En septembre 2020, l’Affaire du Siècle dépose un mémoire en réplique aux arguments de l’État et l’instruction est clôturée en octobre.
En 2019, la commune de Grande-Synthe dépose un recours contre l’inaction climatique de l’Etat français devant le Conseil d’Etat. Il s’agit d’un recours jumeau à celui de l’Affaire du Siècle : l’objectif est de faire reconnaître l’inaction climatique de l’Etat et de le forcer à prendre de nouvelles mesures. Pour maximiser les chances de gagner devant les tribunaux, les 4 ONG de l’Affaire du Siècle décident de devenir parties à ce procès sous la forme d’une “intervention volontaire”. Le 19 novembre 2020, le Conseil d’Etat se prononce sur le caractère obligatoire des trajectoires climatiques de la France, jusqu’alors considérées comme optionnelles, et demande aux parties de démontrer si ces trajectoires pourront être respectées ou non. Si la réponse est négative, il ordonnera à l’Etat de prendre de nouvelles mesures et que cet ordre sera assorti d’une astreinte. Une décision finale est attendue à l’été 2021.
3 – Première audience au tribunal : une victoire historique !
L’Affaire du Siècle a enfin une date d’audience au tribunal : le 14 janvier 2021. Chaque partie y expose ses arguments. 3 semaines plus tard, la décision est rendue : pour la première fois, la justice reconnaît la responsabilité de l'État dans le dérèglement climatique de par son inaction. C'est une victoire historique pour le climat ! Une autre nouveauté : la justice a reconnu que l'inaction de l'État face aux changements climatiques porte atteinte à l'environnement et qu’il y a donc un préjudice écologique. L'instruction est rouverte pendant deux mois, afin que les 4 ONG puissent apporter des éléments complémentaires sur les mesures qui doivent être ordonnées à l'État pour rattraper son retard.
L’État français condamné : l’inaction climatique est illégale !
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4- Deuxième audience et jugement final !
Le 6 avril 2021, la Fondation Nicolas Hulot et les 3 autres ONG requérantes répondent à la demande du tribunal et déposent un nouveau mémoire qui détaille les actions demandées à l’État. Dans une étude produite par le cabinet de conseil Carbone 4, nous démontrons qu’avec les actions actuelles de la France, y compris la loi Climat et résilience, les objectifs climatiques de la France ne pourront pas être atteints… D’ici à l’automne 2021, une nouvelle audience devrait avoir lieu pour déterminer quelles mesures complémentaires devraient être prises par l’Etat, et le tribunal administratif rendra une nouvelle décision, environ deux semaines plus tard. Le tribunal obligera-t-il l’État à agir ? Cela pourrait être une première en droit français…
5- Un éventuel appel
Si l’une des parties fait appel du jugement, l’Affaire sera portée devant la Cour administrative d’appel de Paris. Ensuite, si l’une des parties n’est pas satisfaite avec la décision de la Cour administrative, elle pourra saisir le Conseil d’État.
Devenez un témoin du climat pour soutenir l’Affaire du Siècle
Le 18 décembre 2019, à l’occasion du premier anniversaire de l’Affaire du Siècle, les quatre associations requérantes ont lancé un grand appel à témoignages pour créer une cartographie inédite des impacts du dérèglement climatique en France. Canicules, sécheresse, pluies diluviennes, érosion du littoral…tous les citoyennes et citoyens sont invités à s’exprimer sur les impacts constatés dans leur quotidien. L’objectif : pousser l’Etat à ouvrir les yeux face à la réalité des changements climatiques et le forcer à agir !
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