Décryptage

Climat : La France n’est pas sur la bonne voie pour atteindre ses objectifs à 2030

Publié le 24 février 2021 , mis à jour le 21 avril 2021

Dans une étude inédite commandée par la FNH et les 3 autres organisations de l’Affaire du Siècle , auprès de Carbone 4, cabinet de conseil spécialiste de la transition énergétique, la situation est très claire : les mesures actuelles (lois, décrets, plan de relance…) et celles envisagées dans le projet de loi Climat et résilience bientôt débattu à l’Assemblée nationale, ne suffiront pour que la France respecte ses engagements climatiques à l’horizon 2030.

Carbone 4 a étudié en détail trois secteurs clés de la transition climatique, qui représentent 50% des émissions nationales (le transport de passagers, le logement et l’agriculture) ; et a analysé globalement tous les autres.

Sur onze indicateurs de réussite passé au crible par Carbone 4, neuf sont en dehors des clous

L’étude ne s’est pas basée sur les tonnes de gaz à effet de serre, mais sur l’atteinte (ou non) de onze paramètres structurants de la « Stratégie nationale bas carbone » de la France. Ces paramètres sont des leviers et indicateurs concrets de la transformation réelle de notre pays pour répondre à l’enjeu climatique. Ils représentent 80% du potentiel de réduction d’émissions dans trois secteurs étudiés en détail : le transport de passagers, le logement et l’agriculture.

Ces paramètres comprennent par exemple, la taille du cheptel bovin, la part des véhicules à faibles émissions, le nombre de rénovations performantes de logements, etc. Carbone 4 montre ainsi qu’avec les mesures actuelles et celles prévues dans le projet de loi Climat et résilience, la France n’atteindra pas sa cible en 2030 pour neuf des onze paramètres étudiés dans les trois secteurs clés.

Indicateurs trajectoire climatique de la France

Il est également impossible que les autres secteurs (industrie, énergie, déchets, etc.) compensent ce manque, puisqu’ils ne sont pas en avance sur leurs objectifs et que la Stratégie nationale bas carbone suppose que chaque secteur de l’économie fasse sa juste part de l’effort. L’existence de mesures néfastes pour le climat, et le rehaussement à venir de l’objectif 2030 dans le cadre du nouvel effort européen de -55% de baisse des gaz à effet de serre en 2030, constituent en outre des facteurs aggravants.

Une étude commandée par l’Affaire du Siècle pour soutenir le recours juridique de Grande-Synthe

La commune de Grande-Synthe a attaqué l’Etat pour inaction climatique, devant le Conseil d’Etat en novembre 2018. Compte tenu de la proximité avec leur recours, les 4 organisations de l’Affaire du Siècle ont décidé en février 2020 de soutenir l'action en justice de Grande-Synthe, en y ajoutant des arguments juridiques. Le 19 novembre dernier, le Conseil d'État a donné trois mois au gouvernement pour « justifier que la trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre à horizon 2030 pourra être respectée ». De son côté, l’Affaire du Siècle a fait appel au cabinet Carbone 4 pour démontrer que les actions actuelles de l’Etat ne sont pas à la hauteur de l’enjeu.

Rectifier le tir est encore possible : La FNH se mobilise à travers la loi Climat et l’Affaire du Siècle

Du côté de la justice climatique, l’Affaire du Siècle a déposé les résultats de l’étude ainsi que de nouvelles pièces juridiques auprès du Conseil d’État, qui rendra sa décision sur le recours de Grande-Synthe à l’été.

En parallèle, dans le recours de l’Affaire du Siècle, le tribunal administratif de Paris a reconnu, le 3 février dernier, la responsabilité de l’État français dans la crise climatique, l’illégalité de son inaction et la nécessité de réparer les dommages ainsi causés. Les juges ont donné à l’Affaire du Siècle et à l’État jusqu’au 6 avril pour produire de nouveaux arguments qui lui permettraient de déterminer avec précision les mesures qui doivent être ordonnées à l’État.

Par ailleurs, pour la Fondation Nicolas Hulot tout l’enjeu est que le projet de loi Climat et résilience soit renforcé par les parlementaires, d’ici sa présentation à l’Assemblée Nationale, fin mars. Comment redonner de l’ambition à cette loi ? La FNH soutient deux propositions phares : D’une part, une obligation de rénovation énergétique des logements, progressive et juste, dès 2024. D’autre part, une obligation pour les grosses entreprises à se fixer une trajectoire de réduction de leur empreinte carbone d’ici 2030, sous peine de sanction si la trajectoire n’est pas respectée.

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