Alors que la loi d’orientation agricole votée fin février réaffirme l’objectif ambitieux de 21% de surface agricole utile en bio d’ici 2030, force est de constater que la consommation des ménages ne suit pas. Entre 2020 et 2023, les ventes de produits bio ont baissé de 12% en grande distribution. La faute aux consommateurs ? Pas si simple selon la Fondation qui épingle une grande distribution qui ne joue pas son rôle. Pour y voir clair, la Fondation a étudié les stratégies des 8 principaux groupes français de distribution qui pèsent, à eux seuls, près de 60% des ventes de produits alimentaires en France.
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Découvrez dans ce rapport les stratégies adoptées par la grande distribution, en matière de développement et promotion des filières issues de l’agriculture biologique.
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Par leurs stratégies, les distributeurs orientent les comportements alimentaires.
Si la hausse des prix et les difficultés économiques jouent un rôle dans le recul de la consommation de bio, il convient aussi de ne pas sous-estimer le pouvoir de la grande distribution sur les comportements des consommateurs. Car ces derniers ne peuvent pas tout : Comment acheter des produits bio si l’on n’en trouve pas suffisamment en magasin ? S’ils ne sont pas accessibles financièrement ? Ou si les messages publicitaires et promotions mettent en avant d’autres produits ? Toutes ces questions trouvent des réponses dans ce que l’on appelle l’environnement alimentaire, autrement dit les conditions physiques, économiques, socio-culturelles et cognitives de nos pratiques alimentaires.
C’est sous ce prisme que la Fondation a étudié les stratégies des 8 principaux groupes français de distribution. Avec l’appui du cabinet CERESCO, elle a conduit une revue des documents publics disponibles (rapport RSE, rapport d’activités, programmes de fidélité, supports de communication, réseaux sociaux de l’enseigne, articles de presse) et réalisé des entretiens avec des distributeurs entre décembre 2024 et février 2025. Sur les 8 distributeurs étudiés, 5 ont accepté d’y répondre : Carrefour, Coopérative U, Lidl, Les Mousquetaires/Intermarché et Casino/Monoprix. Pour Aldi, Auchan et Leclerc, l’évaluation s’est uniquement basée sur les données disponibles publiquement.
ÉVALUÉES DE A à G SUR DES INDICATEURS-CLÉS, LES ENSEIGNES RÉVÈLENT LEURS INSUFFISANCES SUR CHACUN DES PILIERS DE l’ENVIRONNEMENT ALIMENTAIRE.
La Fondation a évalué de A à G les engagements et efforts réalisés par les enseignes pour promouvoir la bio, en sélectionnant, pour chaque pilier de l’environnement alimentaire, deux indicateurs-clé qui illustrent la stratégie des enseignes.
Pilier stratégie et transparence : les distributeurs obtiennent la note globale F
Pour établir cette évaluation, la Fondation s’est intéressée à l’existence d’une stratégie bio chez les enseignes et à la présence d’objectifs chiffrés (en termes de référencement, de prix et de communication). Résultat : le bio est sorti de la feuille de route de la plupart des distributeurs ; plus aucun ne présente d’objectif chiffré en matière d’agriculture biologique.

Pilier environnement physique : les distributeurs obtiennent la note globale E
Pour évaluer ce pilier, la Fondation s’est intéressée à la présence d’offre biologique en magasin ainsi qu’à la visibilité des produits bio en rayon, sur les catalogues, les sites et drives. Résultat : trop peu de bio disponible dans les rayons et une part d’offre qui connaît une forte diminution depuis la crise (avec notamment 7 à 25% de références bio en moins selon les enseignes entre 2022 et 2023 ).

Pilier Environnement économique : les distributeurs obtiennent la note globale D.
Pour évaluer ce pilier, la Fondation s’est intéressée à l’écart de prix entre le bio et le conventionnel, ainsi qu’à l’intégration du bio dans les programmes fidélité des enseignes. Résultat : 2 enseignes sur 8 ont un écart de prix évalué à plus de 70%[1] alors que certaines parviennent à le maintenir sous les 60%, d’après l’étude la plus récente sur le sujet. Notons aussi que seule 1 enseigne possède un programme de fidélité dédié au bio. Pour les autres, le bio est soit absent du programme de fidélité, soit présent mais d’une manière non quantifiée.

Pilier socio-culturel et cognitif : les distributeurs obtiennent la note globale E
Pour évaluer ce pilier, la Fondation s’est intéressée à la part des investissements publicitaires dédiée au bio en 2021, au soutien de la campagne BioReflexe de l’Agence Bio et aux actions diverses déployées par les enseignes pour améliorer l’état des connaissances des consommateurs. Résultat : 7 enseignes sur 8 ont dédié moins de 5% de leurs investissements média à la bio en 2021, lui réservant une part dérisoire au regard des sommes investies, et seule 3 enseignes mènent des actions pédagogiques en faveur de la bio.

Que peuvent faire les enseignes pour favoriser la bio ?
Pour atteindre l’objectif de 21% de surface agricole utile en bio d’ici 2030, la Fondation estime qu’il va falloir multiplier par 2 la part de bio dans la consommation à domicile, en passant de 6 à 12%. Pour y parvenir, elle pose 6 recommandations clés entre les mains des distributeurs et des décideurs :
Pour les distributeurs :
- Fixer, publier et piloter des objectifs ambitieux, pour atteindre au moins 12% de ventes alimentaires bio en 2030.
- (Re)nouer des liens avec l’amont de filières biologiques, en enclenchant un dialogue avec leurs représentant.e.s pour établir des feuilles de routes, et en multipliant les engagements tripartites sur les filières bio.
- Renforcer la communication et la formation sur le label bio, non-seulement auprès des consommateurs en renforçant les opérations de promotion et de communication sur le label, mais aussi et surtout en interne en formant les équipes et la direction au plus-values de la certification bio.
Ces engagements sont à compléter par un appui de l’Etat, afin qu’ils ne restent pas des vœux pieux :
- Ancrer l’objectif de 12% de ventes alimentaires biologiques dans la loi, à l’instar de ce qui a été fait avec les 20% en restauration collective publique et privée dans le cadre d’EGAlim.
- Exiger plus de transparence sur la construction des prix bio envers les industriels et distributeurs, en renforçant le mandat et les moyens de l’OFPM sur ce volet, et en prévoyant un encadrement des marges si des déséquilibres défavorables aux produits de qualité sont constatés.
- Doter les structures du secteur bio de moyens suffisants pour la promotion, la pédagogie et la production de données concernant le label (en particulier l’Agence bio). Poser les bases d’une réflexion autour de la structuration d’une démarche de type interprofessionnelle pour fluidifier la relation entre maillons des filières et permettre la construction de feuilles de route.
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