L’humanité fait face à trois défis environnementaux majeurs : le changement climatique, l’érosion de la biodiversité et la dégradation des sols. Ces dernières années, les décisions politiques et collectives se sont essentiellement centrées sur la lutte contre le dérèglement du climat. La protection de la biodiversité et des sols est pourtant indispensable notamment pour pouvoir s’adapter au changement climatique. Par conséquent, répondre à ces 3 défis ne se fera pas sans la restauration des écosystèmes et des sols.
Lutter contre le changement climatique : pas seulement une histoire de carbone !
La lutte contre le changement climatique passe par deux niveaux d’action. Tout d’abord l'atténuation : afin de limiter l’ampleur de ce changement, il faudra réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) mais aussi augmenter le stockage du carbone dans les sols et les écosystèmes. Ensuite l’adaptation : en parallèle, nos sociétés doivent trouver des solutions qui développent leur résilience, c’est à dire leur capacité à s’adapter aux changements climatiques.
Les écosystèmes ont la capacité de stocker le carbone de l’atmosphère. Sur la totalité des GES émis chaque année, 31% sont captés et stockés par les écosystèmes via les plantes et les sols. Grâce à la photosynthèse, les plantes utilisent le CO2 dans la fabrication des molécules nécessaires à leur développement et lorsqu’elles meurent et se décomposent, le carbone se retrouve dans le sol sous forme de matière organique. Ce service fait partie d’un ensemble de services que l’humain tire gratuitement des écosystèmes : les services écosystémiques. Indispensables aux activités humaines, ils sont souvent méconnus : la pollinisation si utile à l’agriculture, la filtration de l’eau, la protection face aux catastrophes naturelles… C’est une richesse dont l’entretien permettra de maintenir les bénéfices sociaux et économiques dont a besoin la société.
Les écosystèmes rendent toujours services… à condition d’être en bonne santé
La dégradation des écosystèmes, outre la perte de biodiversité, met en danger leur capacité de résilience et donc la pérennité des services écosystémiques qu’ils nous rendent. Or une grande majorité des écosystèmes, remarquables ou extraordinaires, ne sont pas en bonne santé. Les forêts tropicales sont massivement coupées et brûlées pour l’extension des palmiers à huile, de l’élevage de bétail et de l’agriculture industrielle (cultures de soja). Pourtant, en plus de leur biodiversité remarquable, elles sont un stock de carbone considérable et influent sur le climat local et régional. Les mangroves, dont 340 000 hectares sont détruits chaque année, protègent naturellement les côtes face aux tempêtes et autres phénomènes climatiques extrêmes. 115 à 220 millions d’euros sont économisés chaque année grâce aux récifs et aux mangroves de Nouvelle Calédonie. Les zones humides, comme les mares ou les tourbières, ont régressé de 50% en France entre 1960 et 1990. Elles permettent cependant d’atténuer les inondations en régulant le niveau de l’eau, de recharger les nappes souterraines et de fournir à l’homme de l’eau potable et de la nourriture (pêche, ostréiculture).
La liste est encore longue... De la savane africaine à la toundra, du plateau des Alpes à la côte méditerranéenne, l’espèce humaine impacte la majorité des écosystèmes terrestres et en particulier l’un de ses éléments de base : les sols.
Les sols, un défi mondial
Les sols sont communs à tous les écosystèmes terrestres. Ils sont à l’origine directe de nombreux services écosystémiques comme la production de matières premières (production alimentaire, bois), la filtration de l’eau et sont le support de nos infrastructures. Ils conditionnent aussi l’état des écosystèmes et sont donc indirectement liés aux autres services. Actuellement, la surexploitation et la pollution des sols font parties des facteurs d’appauvrissement des écosystèmes.
La dégradation d’un sol, c’est l’altération de ses propriétés physiques, chimiques et biologiques naturelles. C’est ce qu’on appelle la désertification. Ce phénomène, qui touche 40% des terres immergées et plus particulièrement les terres agricoles et les bordures de déserts, se manifeste de plusieurs manières : érosion, perte de fertilité, pollution, assèchement, etc. Les activités humaines, telles que la déforestation, l’intensification de l’agriculture ou l’artificialisation en sont les principales causes et sont souvent aggravées par les conséquences du changement climatique.
Avec une population de 9 milliards d’habitants en 2050, les sols devront fournir à tous une alimentation et une eau saine en quantité suffisante tout en conservant la santé des écosystèmes. Un sol en bonne santé, c’est donc l’assurance d’une alimentation pour tous et un premier pas vers un écosystème restauré.
La restauration, par où commence-t-on ?
Tout commence par une prise de conscience massive, qui est le socle de toute action efficace. Il faut donc prendre conscience et faire prendre conscience que l’on ne gagnera pas la bataille climatique sans les écosystèmes, que la restauration des écosystèmes et de leurs services est nécessaire, et que la biodiversité n’est pas uniquement une victime du changement climatique mais aussi une source de solution.
Les solutions existent déjà, elles ont besoin d’être soutenues et développées. Concernant l’agriculture, l’agroécologie offre la possibilité de produire en quantité et d’augmenter le taux de carbone dans le sol tout en préservant la biodiversité. Sous toutes les latitudes, des pratiques agroécologiques permettent aux populations locales de restaurer les sols agricoles et de lutter contre la désertification, de faire des économies d’eau et de produire une alimentation saine et durable. Soutenir ces solutions est simple. Les produits issus de l’agriculture biologique, par exemple, valorisent un système sans pesticides et sans engrais minéraux de synthèse, les produits labélisé FSC garantissent un bois venant de forêts gérées durablement... Favoriser ces modèles de productions durables valorise le travail des producteurs et encourage le développement de ces pratiques responsables.
À ce soutien des citoyens, doit suivre celui de la sphère politique avec des décisions fortes. La création d’une loi de protection des sols ou de programmes favorisant les solutions naturelles doivent être portés : restauration des zones humides pour lutter contre les inondations, agroforesterie pour rafraîchir localement l’atmosphère et stocker du carbone tout en augmentant la productivité…
Pour que ces décisions soient efficaces et s’inscrivent dans le temps, elles doivent être accompagnées d’un système économique cohérent. Des outils existent déjà comme les paiements pour services environnementaux, la compensation ou le développement d’une fiscalité environnementale. Chaque outil a un objectif (incitation à la bonne pratique environnementale, mobilisation des financements privés) et c’est en les combinant qu’une action large mobilisant tous les acteurs d’un territoire est possible.
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