Communiqué de presse

Agriculture bio : quels débouchés pour sauver la filière ?

Publié le 16 janvier 2024

Bien qu’indispensable pour relancer la demande de produits biologiques, la restauration collective ne suffira pas. La restauration commerciale et la grande distribution doivent également être mobilisées. C'est la conclusion de notre nouvelle étude "Agriculture bio : quels débouchés pour sauver la filière ?"

Agriculture bio : quels débouchés pour sauver la filière ?

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La survie de la bio exige l’activation de tous les débouchés

A partir de janvier 2024, la France a six ans pour atteindre l'objectif qu'elle s'est fixé : atteindre 21 % de la Surface Agricole Utile (SAU) en agriculture biologique en 2030[1]. Cependant, l’atteinte de cet objectif semble déjà compromise : la surface agricole en bio est de 10,7 % actuellement et la filière biologique française traverse une crise sans précédent. En effet, en 2022, les surfaces en première année de conversion ont chuté de 40% et en 2023, les pertes économiques pour les agriculteurs biologiques ont été estimées entre 250 et 300 millions d’euros.

Pour sortir de cette impasse, la question des débouchés de la bio est centrale. La FNH a donc estimé, dans cette étude, l’impact de l’évolution de la consommation de bio sur l’augmentation des surfaces agricoles cultivées en bio. Le résultat est sans appel : inclure 20% de produits bio en restauration collective est une étape nécessaire, mais insuffisante. Il sera également nécessaire d’introduire 20% de bio dans les achats de la restauration commerciale (hôtels, cafés, restaurants) et d’atteindre 7,8% de bio dans la consommation à domicile pour que l’Etat respecte ses engagements et assure un avenir à la filière.

Zoom sur les étapes à suivre pour atteindre l’objectif d’ici 2030

En prévision des arbitrages du prochain Programme Ambition Bio, mais également de la Stratégie Nationale pour l’Alimentation et le Climat (SNANC) et de la future Loi d’Orientation et d’Avenir Agricoles (LOA), la FNH propose une feuille de route, jalonnée de plusieurs étapes, pour atteindre l’objectif à horizon 2030.

Sauver la bio : une course contre la montre

🚩Point de départ : 10,7% de surfaces agricoles en bio aujourd’hui

D’après nos calculs[2], la restauration collective se fournit à hauteur de 6,7% de produits biologiques dans l’ensemble de ses approvisionnements, la restauration commerciale à hauteur de 1,7% et les ménages français achètent environ 5,7% de produits biologiques pour leur consommation à domicile.

  • Etape 1️⃣ : 12% de surfaces agricoles en bio grâce à la restauration collective. Si la consommation de produits biologiques reste la même dans la restauration commerciale et dans la consommation à domicile, mais que la restauration collective atteint 20% de produits biologiques dans ses approvisionnements (respect des lois EGAlim et Climat et Résilience), cela créerait les débouchés suffisants pour continuer à développer la production bio et ainsi atteindre environ 12% de surfaces agricoles en AB.
  • Etape 2️⃣ : 14% de surfaces agricoles en bio en mobilisant l’ensemble de la Restauration Hors-Domicile (RHD). Si la consommation de produits biologiques reste la même dans la consommation à domicile, mais que l’ensemble de la restauration hors-domicile (collective et commerciale) atteint 20% de produits biologiques dans ses approvisionnements, cela créerait les débouchés suffisants pour atteindre environ 14% de surfaces agricoles en AB.
  • Etape 3️⃣ : 18% de surfaces agricoles en bio en mobilisant l’ensemble de la RHD et en revenant au niveau de 2020 de consommation du bio à domicile. Si l’ensemble de la RHD atteint 20% de produits biologiques dans ses approvisionnements et que la consommation de bio à domicile revient à son niveau de 2020, soit 6,5%, cela créerait les débouchés suffisants pour atteindre 18% de surfaces agricoles en AB (objectif fixé par le gouvernement pour 2027).

🏁 Point d’arrivée : 21% de surfaces agricoles en bio

Si l’ensemble de la RHD atteint 20% de produits biologiques dans ses approvisionnements et que la consommation de bio à domicile atteint 7,8%, cela créerait les débouchés suffisants pour atteindre 21% de surfaces agricoles en AB (objectif fixé par le gouvernement pour 2030). La mobilisation de la consommation à domicile est une étape cruciale du fait des volumes et des débouchés structurants qu’elle représente (actuellement 92% des débouchés pour la filière biologique).

Stimuler les débouchés pour la bio : quelles solutions ?

La FNH fait plusieurs recommandations de politiques publiques à mettre en oeuvre dans le cadre du nouveau Programme Ambition Bio (pour éviter qu'il se solde par un nouvel échec)[3], mais aussi dans la prochaine SNANC et dans la LOA :

1.Poursuivre le développement des débouchés en mobilisant l’ensemble de la restauration hors-domicile

  • Créer un fonds EGAlim pour accompagner la restauration collective publique des secteurs de la santé et du médico-social et garantir l’exemplarité de chaque restaurant collectif d’Etat d’ici la fin de l’année 2024.
  • Inclure l’atteinte des objectifs des lois EGAlim et Climat et Résilience dans les critères d’inspection des restaurants collectifs fixés par la Direction Générale de l’Alimentation.
  • Mettre en place une bonification durable du titre restaurant pour récompenser les salariés qui achètent leur repas dans des restaurants proposant une offre alimentaire durable.
  • Rendre obligatoire, dès à présent, l’affichage dans chaque restaurant commercial du pourcentage de produits durables dans ses achats et étendre, dans un second temps, les obligations EGAlim à l’ensemble de ce secteur. 
  • Renforcer, dans les formations continues et initiales de l’hôtellerie et de la restauration, les enseignements consacrés à l’agriculture biologique et à la durabilité de l’offre alimentaire des restaurants (« moins et mieux » de viande, produits bruts, diminution du gaspillage alimentaire, etc.).

2. Instaurer une véritable politique alimentaire pour renforcer la consommation de produits biologiques à domicile

  • Renforcer les aides du Fonds « Mieux manger pour tous » destinées à financer des expérimentations favorisant l’accès à tous, en particulier aux plus précaires, aux produits durables (ex : chèque alimentaire durable). 
  • Inciter les distributeurs à proposer des paniers de produits biologiques de première nécessité à prix réduits, en période de hausse des prix alimentaires.
  • S’assurer que le futur affichage environnemental ne pénalise pas, mais au contraire, valorise les produits biologiques.
  • Rendre obligatoire la transparence de l’information de la part des acteurs de la distribution et de la transformation sur les prix et les marges réalisés sur les produits biologiques, ainsi que sur le pourcentage de produits durables dans leur offre alimentaire.
  • Renforcer les financements publics destinés à la communication sur le bio (Agence Bio, Santé Publique France) et inciter les interprofessions et les acteurs de l’industrie agroalimentaire et de la distribution à promouvoir le bio dans leurs campagnes publicitaires.

Ces politiques publiques visant à soutenir la demande devront être mises en place de façon concomitante avec des politiques publiques visant à soutenir la production bio, à l’instar de :

  • la mise en place d’aides d’urgence pour compenser les pertes économiques des agriculteurs bio occasionnées par la crise ;
  • la hausse de l’éco-régime bio (145 euros/ha au lieu des 93 euros/ha actuels) pour compenser la suppression des aides au maintien ;
  • le développement de Paiements pour Services Environnementaux spécifiques à la bio ;
  • la mise en place de la gratuité de la certification.

Sources

 [1] Objectif que l’Etat français s’est fixé dans plusieurs de ses stratégies et plans gouvernementaux comme la Stratégie Nationale Bas Carbone, la Stratégie Nationale Biodiversité 2030 ou le plan “Mieux agir. La planification écologique” du Secrétariat Général à la Planification écologique.

F[2] Ces calculs sont réalisés à partir des données de : Gira Foodservice pour France AgriMer. (2018). Panorama de la consommation alimentaire hors domicile ; INSEE. (2020). Consommation des ménages ; et de l’Agence Bio.

[3] Le dernier Programme Ambition Bio (2018-2022) visait 15 % de la Surface Agricole Utile (SAU) en bio à horizon 2022, or, en 2022, les surfaces agricoles en agriculture biologique atteignaient seulement 10,7 % selon les chiffres de l’Agence Bio.

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