Après des mois de débats, la loi d'accélération des Énergies Renouvelables a été votée le 7 février dernier. Tout au long du processus, la FNH a pointé du doigt l’incohérence de permettre la dégradation de la nature en détruisant des forêts pour y installer, par exemple, des panneaux photovoltaïques. Car non, il n’est pas nécessaire de choisir entre énergies renouvelables et biodiversité. Nous avons toutes les cartes en main pour développer les ENR tout en préservant les écosystèmes. La FNH a proposé des solutions en ce sens, Rémi Guidoum, notre responsable Biodiversité, explique les coulisses de notre mobilisation.
Comment accélérer et prioriser le déploiement du photovoltaïque avec Rémi Guidoum
La FNH s’est mobilisée sur l’articulation entre développement du photovoltaïque et protection des sols : que peut-on retenir sur ce point ?
Notre objectif était de pousser un maximum de mesures permettant de déployer les panneaux photovoltaïques en priorité sur le bâti et les espaces artificialisés, afin de protéger les sols. De ce point de vue, cette nouvelle loi est une étape. Des avancées ont pu être obtenues, bien que parfois très restrictives et assorties de conditions dérogatoires qui devront être précisées par décret, tandis que certaines mesures utiles ont été écartées.
Des avancées à préciser et amplifier
Parmi les éléments les plus importants, on peut noter que la loi crée plusieurs nouvelles obligations :
- extension des obligations existantes d’installation de panneaux solaires ou de systèmes végétalisés à de nouvelles catégories de bâtiments neufs ou lourdement rénovés (bâtiments administratifs, scolaires et universitaires, équipements sportifs et de loisir), avec une augmentation progressive de la part de toiture devant être couverte, de 30% à 50% entre 2023 et 2027 ;
- obligation d’installation, à partir de 2028, d’un procédé de production d’énergie renouvelable ou de végétalisation sur les bâtiments non résidentiels de plus de 500 m2 au sol existants depuis juillet 2023. La part de la toiture devant être équipée, de même que certains critères permettant de déroger à l’obligation devront néanmoins être précisés par décret.
- obligation d’installation d’ombrières photovoltaïques sur au moins la moitié de la surface des parkings existants de plus de 1 500 m2. Là aussi, des dérogations ont été prévues (par exemple lorsque le parking est ombragé par des arbres sur au moins la moitié de sa surface), dont certains critères d’application devront être précisés par décret.
→ Sur ce point, le texte initial proposé par le Gouvernement ne concernait que les parkings de plus de 2 500 m2. Parmi les propositions que nous avons portées figurait notamment l’abaissement de ce seuil.
Une mesure importante du point de vue de la protection des écosystèmes
La loi a introduit l’interdiction de tout nouveau projet de centrales solaires sur des espaces forestiers induisant un défrichement de 25 hectares ou plus, dans un délai de 12 mois après la promulgation de la loi. Cette mesure est particulièrement importante, et constitue un premier pas vers des règles plus restrictives encore, notamment pour éviter que cette interdiction soit contournée par la multiplication de projets d’une surface inférieure au seuil. En effet, dans son rapport de juillet 2022, le Haut Conseil pour le Climat alerte sur l’effondrement de la capacité des forêts françaises à stocker le carbone, laquelle a baissé de 48% depuis 2010 ! Dans ce contexte, et alors que les puits de carbone sont cruciaux pour espérer atteindre nos objectifs de limitation du dérèglement climatique, abattre des forêts pour installer des panneaux photovoltaïques est vraiment contreproductif - du point de vue du cycle du carbone mais aussi de l’eau.
Une occasion manquée de concilier changement climatique, préservation de la biodiversité et justice sociale.
La FNH s'est particulièrement mobilisée autour d'une mesure clé: permettre aux ménages d'accéder à un prêt à taux zéro pour l’installation de panneaux solaires sur leur toiture. Dans un contexte où les prix de l’électricité sont très élevés, l’autoconsommation est particulièrement intéressante et cette proposition d’éco-prêt à taux zéro aurait permis de lever un blocage important, celui de l’investissement initial à réaliser.
Malheureusement, le Gouvernement et la majorité à l’Assemblée nationale ont considéré que les dispositifs existants étaient suffisants pour soutenir l’autoconsommation photovoltaïque. Le Gouvernement devra cependant remettre au Parlement un rapport sur “les soutiens financiers existants à l’installation de dispositifs de production d’énergie solaire ainsi que sur les mesures financières envisagées pour accélérer leur déploiement”. La FNH restera attentive à la publication de ce rapport.
Quelles sont les prochaines étapes ?
Maintenant que la loi est votée, il est important de veiller à ce que les décrets d’application soient pris rapidement et qu’ils maintiennent le plus haut niveau d’ambition possible. La FNH sera donc attentive à l’élaboration de ces textes, en veillant notamment à ce que les dérogations prévues ne soient pas telles qu’elles réduisent significativement la portée des mesures. Au cours des prochains mois, nous aurons également plusieurs opportunités de faire avancer nos propositions, par exemple dans le cadre des débats sur le projet de loi de finances pour 2024.
L'article vous a été utile pour mieux comprendre cette actualité ?
Pour approfondir le sujet