En France, comme dans toutes les démocraties modernes, le politique, n’est pas en mesure de défendre l’avenir des jeunes générations et des suivantes. La nécessité dans laquelle il se trouve de répondre, souvent dans l’urgence, aux problèmes et aux intérêts du présent, lui fait perdre de vue la sauvegarde des grands équilibres de la planète (climat, biodiversité, acidification des océans, etc.).
Pour remédier à cette situation, le président de la République a annoncé, devant le Parlement réuni en Congrès, à Versailles, le 3 juillet 2017, la transformation du Conseil économique social et environnemental en « chambre du futur ».
Pensée comme un véritable contre-pouvoir démocratique, cette institution nouvelle génération constitue, à l’interface entre le savoir scientifique et l’innovation citoyenne, une garantie de la prise en compte des enjeux du long terme au sein du processus législatif.
Le livre « Inventer la démocratie du XXIe siècle, l’Assemblée citoyenne du futur », formule la proposition la plus aboutie d’une telle institution. Il montre qu’il est possible, à condition d’une politique forte, de renouer avec la créativité institutionnelle et d’oser inventer la démocratie du XXIe siècle.
Pourquoi créer une nouvelle institution?
La forme démocratique classique est, et a toujours été, soumise à la pression des intérêts de court terme. Cette difficulté des régimes démocratiques à intégrer le souci du long terme dans leur fonctionnement, Pierre Rosanvallon la qualifie de « myopie des démocraties ».
Or, nous sommes désormais confrontés à des éléments nouveaux qui nous poussent à réinventer/adapter/compléter nos institutions représentatives.
Parce que nous agissons désormais sur une échelle inédite (globale) et ce de manière irréversible (sur une échelle temporelle qui s’étend sur des siècles, voir des millénaires), nous devons désormais outiller notre démocratie représentative pour faire face aux enjeux de long terme, comme ceux du changements climatiques.
L’Assemblée citoyenne du futur permet :
- d'assurer le chaînon manquant entre le savoir scientifique et l’action politique ;
- de s’appuiyer sur la richesse de la créativité citoyenne.
Quelles sont les missions de l’Assemblée citoyenne du futur ?
L’Assemblée citoyenne du futur se situe à l’intersection entre la créativité sociale et l’expertise scientifique. Elle est dotée de deux grandes missions :
- garantir la prise en compte du long terme dans le processus législatif ;
- associer les citoyens à la fabrication de la loi.
Qu’est-ce que le long terme ?
Le long terme concerne l’évolution des équilibres de la biosphère dont la modification a des effets à très long terme (siècles, millénaires), voire irréversibles. Les sciences de l’environnement identifient des limites, paramètres physiques, à ne pas franchir sous peine de basculer dans un nouvel état du système, dangereux pour l’humanité.
A quelles conditions peut-on vraiment parler d’Assemblée citoyenne du futur ?
Cette nouvelle assemblée doit être dotée de pouvoirs lui permettant de remplir sa mission qui est de garantir la prise en compte du long terme dans la production législative (elle ne peut pas être consultative).
Les modalités de désignation de ses membres permettent une composition libérée, du moins en partie, de la pression partisane, politique et des intérêts de carrière.
Pour assurer ces missions, l’Assemblée citoyenne du futur aura à sa disposition des pouvoirs et des outils qui lui seront spécifiques.
Quels sont les pouvoirs et outils à la disposition de l’Assemblée citoyenne du futur pour remplir ses missions ? Quels pouvoirs peuvent garantir la prise en compte du long terme dans le processus législatif ?
- Un pouvoir d’initiative législative spécialisé : elle peut concevoir des grands projets législatifs liés au long terme (issus d’initiatives citoyennes entre autres), ou demander au gouvernement et aux deux autres assemblées de se saisir d’un sujet dont elle estime qu’il doit donner lieu à un examen législatif ;
- Un pouvoir d’alerte législative : sans s’inscrire dans la procédure elle-même, elle peut : soit demander, en amont, le report de l’inscription à l’ordre du jour du Parlement une proposition ou un projet de loi dont l’étude d’impact relèverait une insuffisance vis-à-vis des conséquences sur le long terme ; soit alerter publiquement le gouvernement et le Parlement, au cours de l’élaboration de la loi, en cas de méconnaissance de ces enjeux de long terme ;
- Une demande de nouvelle délibération : après le vote de la loi, mais avant promulgation, elle peut voter en plénière, à la majorité des deux tiers, une demande de nouvelle délibération si la loi votée est contraire aux grands enjeux de long terme.
- Un pouvoir de saisine du Conseil Constitutionnel avant que la loi ne soit définitivement promulguée par le président de la République (ce qui justifie des appuis constitutionnels solides, voir ci-dessous).
Quels sont les outils permettant d’associer les citoyens au processus législatif ?
- Une plateforme numérique de consultation citoyenne ;
- Le pouvoir de saisir la Commission Nationale du débat public (CNDP) ;
- L’organisation de jurys ou de conférences de citoyens ;
- Un cadre d’accompagnement pour favoriser l’expérimentation des initiatives citoyennes.
Pourquoi adosser à l’Assemblée citoyenne du futur un Haut conseil du long terme ?
Pour le bon fonctionnement de l’Assemblée citoyenne du futur, il est nécessaire d'y adosser une autre institution, le Haut conseil du long terme.
Ce Haut conseil, tel un « mini GIEC », sera dévolu à la veille scientifique dans des domaines où les connaissances évoluent fortement (alimentation, catastrophes naturelles, biotechnologie, anthropotechniques, etc.). Sa mission sera double :
- Exercer une veille sur l’état des connaissances (et leur évolution) relatives aux ressources (minérales, énergétiques, en matière d’eau douce et écosystémiques), à la biosphère et ses mécanismes régulateurs (climat, biodiversité et autres limites planétaires) sur le plan international ;
- Informer le gouvernement, les parlementaires, les membres de la troisième chambre, mais aussi les citoyens.
Quels sont les nouveaux principes constitutionnels sur lesquels l’Assemblée citoyenne du futur pourra s’appuyer ?
L’Assemblée citoyenne du futur devrait pouvoir s’appuyer sur des principes constitutionnels nouveaux, qui dépassent ceux du développement durable. Ainsi, pourraient être introduits dans la Constitution :
- Le principe de non régression du droit de l’environnement ;
- Le principe du respect des limites de la planète Terre.
L’Assemblée citoyenne du futur ferait ainsi entrer l’environnement et la prise en compte du bien être des générations futures de manière systématique et permanente dans la production de la loi. Elle est conçue à la fois comme un contre-pouvoir démocratique et un outil de cohérence législative.
Elle constituerait une avancée démocratique majeure, reproductible dans d’autres systèmes constitutionnels, et une évolution essentielle pour la mise en œuvre de la transition écologique.
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