Plus de 2 millions de personnes pratiquent chaque année la pêche à pied. Cette activité récréative, séduit de plus en plus d’adeptes avec un pic l’été, en famille ou entre amis. À chaque marée basse, casquettes sur la tête et seaux en main, bon nombre de pêcheurs amateurs scrutent l’estran pour y dénicher coques, palourdes, huitres, praires, moules, étrilles, crevettes ou autres bigorneaux.
Il est indispensable de bien se préparer avant de s’aventurer sur l’estran. Avec notre partenaire, le CPIE Marennes-Oléron, nous vous donnons quelques conseils pour pêcher responsable.
Pêche à pied : les 10 bons réflexes
Bien pratiquée, c'est-à-dire en réduisant au maximum son impact sur l'environnement, la pêche à pied peut se révéler être un formidable moyen de découvrir la richesse et la fragilité du milieu marin et de comprendre la nécessité de protéger l’habitat naturel de chaque espèce. Comme toute activité sur le domaine public, la pêche à pied est soumise à une réglementation qui varie en fonction de la zone géographique, de la saison, des espèces et de leur densité.
- Réflexe n°1 : s’informer auprès de l’office de tourisme ou de la mairie pour connaître les spécificités de la région dans laquelle vous vous trouvez. Vous y glanerez des informations importantes sur la taille règlementaire propre à chaque espèce, les quantités autorisées par jour et par personne ou les interdictions ponctuelles de toutes formes de pêche.
- Réflexe n°2 : avoir une « réglette » ou une tige avec des repères pour mesurer chacune de vos prises et ainsi éviter la « razzia » des coquillages, néfaste pour l’estran.
- Réflexe n°3 : vérifier la conformité des outils utilisés : longueur et largeur maximales autorisées pour les couteaux, le nombre et l’espacement des dents pour les différentes sortes de griffe ou grapette à main, etc. Certains sont totalement interdits comme le marteau ainsi que tout ustensile susceptible de labourer ce milieu fragile.
- Réflexe n°4 : se renseigner sur les horaires de marées car la pêche à pied se pratique sur l’estran, la partie découverte du littoral en fonction des coefficients de marée. La marée est en position basse à partir d’un coefficient de 50. Les grandes marées qui peuvent atteindre un coefficient de 120 permettant de rendre accessibles des zones plus éloignées du rivage. Question de bon sens : l’horaire de marée basse désigne l’heure à laquelle la mer commence à remonter, ce n’est donc pas le meilleur moment pour commencer à pêcher et s’aventurer au loin, surtout avec des enfants. Il faut arriver une ou deux heures avant !
- Réflexe n°5 : se renseigner sur la qualité sanitaire de son site de pêche. Par leur activité de filtration, à but alimentaire, certains coquillages concentrent les contaminants qui peuvent être présents dans l’eau et les sédiments. Aussi, la consommation de coquillages - qui proviennent de secteurs insalubres ou temporairement contaminés - peut avoir des conséquences sur la santé humaine.
- Réflexe n°6 : consulter la météo pour éviter les risques d’orage ou vous perdre en cas de brume marine. Si l’on projette de s’aventurer plus loin que la moyenne, renseignez-vous auprès des pêcheurs locaux au sujet des zones à risques.
- Réflexe n°7 : préparez votre équipement de base (voir le paragraphe ci-après).
- Réflexe n°8 : prévenir de son départ et donner une heure de retour à une personne de son entourage. N’oubliez pas votre montre (ou téléphone) pour mettre une alarme quand l’eau remonte. Valable partout en Europe, le "196" est le numéro d'urgence pour les secours en mer ; très utile si l’on se fait surprendre et encercler par la marée montante ou que l’on s’envase.
- Réflexe n°9 : porter des bottes ou des chaussures type méduse pour ne pas se blesser (rochers, surfaces coupantes, possibilité de contact avec des matières urticantes). De même que le coupe-vent et le couvre-chef sont aussi fortement recommandés.
- Réflexe n°10 : profiter de la pêche à pied pour ramasser les déchets déposés par l'estran. Pensez à prendre un petit sac dans votre poche pour les mégots, bouts de plastique et divers déchets que vous trouverez.
L’équipement de base de la pêche à pied
Pour une pêche à pied douce et respectueuse du milieu, vous aurez besoin… d’un panier de pêche en osier ou d'un seau pour transporter vos prises.
D’une réglette pour mesurer coquillages et crustacés et relâcher les individus trop petits qui ne correspondent pas à la réglementation en vigueur. Il existe des réglettes qui associent une photo des bivalves fouisseurs et le gabarit correspondant à la taille minimale autorisée (bien utile car beaucoup d’erreurs d’identification subsistent entre palourdes, praires, coques et clams pour lesquels les tailles réglementaires de capture diffèrent). Elles sont généralement disponibles auprès des offices de tourisme. Il est aussi possible de tracer deux traits sur le manche de son outil de pêche pour mesurer les coquillages, ou pour les novices, se rédiger un petit memento imperméabilisé, sorte d’antisèche, plié dans sa poche.
De vos mains ! Vous pouvez prévoir un gant protecteur pour décrocher les moules et les huîtres ou vous protéger des pinces des crustacés. Si vraiment vous souhaitez utiliser un ustensile, piochez dans la cuisine : une cuillère à soupe pour creuser, une fourchette pour un ratissage léger, un couteau solide pour décoller les coquillages qui adhèrent fortement. Les crochets à crabes ou les baleines de parapluie ne sont pas recommandés ; en général, on détruit l’animal recherché avant même de l’avoir vu… et s’il est trop petit, il sera mort pour rien.
De gros sel de mer pour certains mollusques comme les couteaux de sable. Ces mollusques fouisseurs réagissent et remontent d’eux-mêmes à la surface. Il suffit alors de les bloquer et de les retirer tout doucement de leur galerie.
D’une épuisette aux mailles assez larges (pour la pêche aux crevettes ou aux étrilles) pour laisser passer les plus petits gabarits. Ce qui n’empêche pas de réaliser le tri sur le lieu de prélèvement et aussitôt remettre les sujets dans leur habitat naturel (et non dans l’eau à 300 mètres de là, après avoir séjourné 1 heure dans un seau ) ! Certains crabes sont mous - ils viennent juste de muer - ils sont alors dépourvus de chair et sans intérêt culinaire, mieux vaut les laisser tranquilles. De même, il est recommandé de laisser en place les femelles dites « grainées », c'est-à-dire avec des œufs sous le ventre, c’est la descendance !
> La pêche à pied est interdite du coucher du soleil jusqu’au lever.
> On ne pêche pas à proximité et à l’intérieur des concessions de cultures marines (parcs à huîtres, bouchots de moules, casiers à crustacés, écluses à poissons, etc.).
> On ne jette aucun déchet sur l’estran mais on en profite plutôt pour ramasser ceux que l’on trouve !
> On fait attention à ne pas piétiner partout, ni labourer avec des engins ou des outils inadaptés.
> On n’arrache pas les algues : on les remet en place lorsqu’on les a soulevées et écartées en cherchant les coquillages fixés sur les parois des rochers (berniques, bulots, bigorneaux, exceptionnellement ormeaux). Si vous optez pour un lit de goémon pour maintenir vos prises au frais, attention à les couper en laissant au moins un tiers de leur longueur pour qu’elles se régénèrent plus vite.
> On privilégie les techniques de pêche douces qui ne perturbent pas le milieu (pêche au trou ou au sel plutôt que le ratissage).
> On replace toujours dans sa position initiale ce que l’on bouge pour préserver la biodiversité qui y est associée. Au même titre qu’un tronc mort à terre en forêt abrite une multitude de micro-organismes, un caillou fait partie intégrante du biotope de l’estran. Comme l’indique le CPIE : « une pierre non remise en place, perd 30% de sa biodiversité en moyenne et mettra environ 3 ans à la retrouver ». Cette pratique responsable est une obligation réglementaire dans certaines régions comme la Bretagne.
> On ne pêche pas plus qu’on ne va consommer. Les produits de la mer ne se conservent pas longtemps, surtout par forte chaleur, donc on ne gaspille pas. Il est par ailleurs strictement interdit de revendre les produits de sa pêche.
Tailles et quantités : la réglementation à suivre
Comme la règlementation diffère selon les régions, les espèces, l’époque de l’année et les conditions sanitaires des côtes, il est important de se renseigner en amont de sa sortie de pêche auprès structures compétentes : structures relais du réseau Littorea (réseau national pour une pêche récréative durable), mairies et offices de tourisme qui relaient les consignes générales et/ou les mesures prises ponctuellement qui émanent des services compétents : DDTM/DML (Direction Départementale des Territoires et de la Mer / Direction Mer Littorale) ; IFREMER (Institut Français de la Recherche pour l’Exploitation de la MER) ; ARS (Agence Régionale de Santé) ; Réseau Littorea sur Facebook et/ou Twitter
Zoom sur les milieux fragiles de la pêche à pied
- Les moulières : sur la partie supérieure des rochers découverts à marée basse, on peut trouver des moules apparaissant en amas enchevêtrés. Ces moulières sont un abri et une réserve de nourriture pour d’autres organismes vivants d’où l’importance de ne prélever que la quantité autorisée, et de scrupuleusement respecter la taille minimale réglementaire. Le meilleur moyen pour être sélectif, et laisser les jeunes moules accrochées au rocher, est de les prélever directement à la main. Pour en savoir plus sur les bonnes pratiques de pêche à la moule
- Les champs de blocs : comme leur nom l’indique ce sont de grandes étendues de pierres rocheuses au sein desquelles vivent quantités d’espèces animales et végétales. Très prisés par les pêcheurs de crabes, étrilles et crevettes, il est indispensable que chacun remette toute pierre retournée dans sa position d’origine. Apprenez-en plus au sujet des bonnes pratiques de pêche à pied dans les champs de blocs grâce au réseau Littorea.
- Les herbiers qui se découvrent à marée basse fourmillent de vie. Ces prairies marines constituées de plantes à fleurs (zostères) constituent l’habitat, le lieu de reproduction et une importante source de nourriture pour beaucoup d’espèces. En hiver, c’est là que les bernaches, des oies protégées, viennent reprendre des forces. Il faut à tout prix éviter de piétiner ces zones très fragiles et surtout ne pas les ratisser. La pêche à pied y est d’ailleurs interdite en Bretagne.
- Les récifs d’hermelles sont le résultat de la colonisation de vers de 3 à 4 cm qui construisent des tubes en collant les grains de sable. Accolés les uns aux autres, ils forment sur les rochers d’immenses structures en nid d’abeilles. Ils ont un rôle prépondérant dans l’écosystème car ils abritent d’extraordinaires densités de juvéniles d’espèces bivalves, de crevettes et de crabes (jusqu’à 60 000 individus par m2) et constituent une importante source de nourriture pour de nombreuses autres espèces. S’étendant parfois sur plusieurs hectares, on évite à tout prix de pénétrer dans le périmètre de ces zones fragiles.
Pour en savoir plus : Pêche à pied loisirs
On peut aussi aller sur l’estran sans pêcher ! Rien de plus simple que d’y découvrir la grande biodiversité présente : étoiles de mer, petits crustacés, vers étranges et gluants, poissons, pontes mystérieuses, algues diverses… Sans compter les nombreux oiseaux marins qui vous accompagneront ! Bonne pêche à pied responsable cet été !
Et pour consommer sa pêche dans les meilleures conditions
- Conservez vos coquillages et crustacés au frais et consommez-les dans les 24 heures qui suivent.
- Faites dégorger les coquillages fouisseurs (coques, couteaux, tellines) dans de l’eau de mer propre que vous pourrez renouveler régulièrement. Attention à ne pas mettre votre récipient en pleine chaleur ou au soleil pour garder une eau bien oxygénée.
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